Traitement médical

 

 

1) Les règles hygiéno-diététiques : Les sports et le Marfan

Les 2 grands types de sport

• Les exercices dynamiques (isocinétiques) s’accompagnent d’une modification de la longueur des muscles et d’un mouvement des articulations, mais assez la force intramusculaire générée est peu importante. La marche, la natation en sont des exemples. Au cours de ces efforts, il faut que l’oxygène libéré au niveau du muscle squelettique qui participe à l’exercice soit maximal. Les vaisseaux périphériques se dilatent, si bien que la pression artérielle s ‘élève peu malgré l’augmentation du débit cardiaque. La pression appliquée sur la paroi aortique n’est donc que peu élevée.

• A l’opposé, les efforts statiques (isométriques) supposent une grande force avec peu de mouvement. L’haltérophilie en est l’archétype. Au cours de ces efforts très intenses de courte durée, la compression musculaire empèche la dilatation des vaisseaux qui sont dans le muscle. La pression artérielle augmente beaucoup, d’autant plus que la masse musculaire impliquée dans l’effort est importante, et que l’effort est intense. La pression appliquée sur la paroi aortique est donc très élevée, ce qui favorise la dilatation et la dissection aortiques.

En fait la plupart des sports comprennent une composante dynamique et une composante statique, non seulement lors de la réalisation des matchs, mais également lors de l’entraînement. La classification des sports est donc un peu artificielle : l’importance du retentissement de l’effort dépend du niveau d’effort fourni auquel peut s’ajouter au cours d’une compétition l’émotion qui élève également la pression artérielle.

Au cours de la maladie de Marfan les sports risquent:

• De favoriser la dilatation aortique et sa dissection si on ne respecte pas les règles ci dessous, et ce d’autant plus qu’on ne prend pas de béta-bloquants (qui vont limiter l’augmentation de fréquence cardiaque et de pression artérielle au cours de l’effort).

• De favoriser une luxation du cristallin, par les chocs et les accélérations et décellérations brutales.

• De compliquer les problèmes orthopédiques (même les personnes qui ne présentent pas d’hyperlaxité… ont des problèmes orthopédiques du fait des sports).

Il est donc la règle de recommander:

• De faire des sports sans esprit de compétition.

• Limiter les arrêts brutaux, les chocs avec les autres joueurs.

• Se limiter à 70% de la capacité maximale.

• Eviter les sports isométriques. Porter plusieurs fois de petites charges est préférable à porter une fois une grosse charge.

• Eviter de tester ses limites.

Voici une liste des sports et leur degré de contre-indication dans votre cas.

 

En résumé

La maladie de Marfan s’accompagne d’une faiblesse de la paroi aortique qu’il faut éviter de soumettre à de trop fortes contraintes. Il est possible de pratiquer les sports d’endurance sans esprit de compétition.

Par contre, les sports de force, lors desquels ont bloque la respiration pour avoir plus de force, sont contre-indiqués (même en amateur) de même que les sports de combat.

Le plus important est de comprendre la raison de cette limitation et de se l’appliquer soit même, quelque soit le sport que l’on pratique.

 

2) Le traitement par les bêta-bloquants

Comment agissent-ils?

Les bêta-bloquants agissent en modifiant l’action du « système sympathique », le rôle dudit système étant de mettre l’organisme en position de se défendre mieux contre une agression extérieure. Il est mis à contribution quand l’organisme a besoin de puiser dans ses réserves, par exemple lorsqu’il est en difficulté, à l’occasion d’un stress, d’une peur, un effort physique, d’une hypoglycémie…

L’organisation du système sympathique est la suivante : une commande centrale se situe au niveau du cerveau, qui va communiquer avec tous les organes en périphérie, par l’intermédiaire d’hormones, telles que l’adrénaline, et par le biais de nerfs. Au niveau du cœur, ils vont accélérer la fréquence cardiaque, et augmenter la force de contraction, ce qui va permettre une augmentation du débit cardiaque. Ils vont agir également au niveau des vaisseaux, où selon les zones et les moments, ils vont entraîner une constriction ou une dilatation, ce qui va permettre au débit cardiaque d’être dirigé là où l’organisme en a besoin.

Au niveau des bronches, le système sympathique va avoir un effet dilatateur. En effet, au cours d’un effort, on avait besoin de ventiler davantage. Sur le plan métabolique, l’activation du système sympathique permet une mobilisation de l’énergie et notamment une élévation du taux de sucre dans le sang, qui permet un peu partout dans l’organisme, de produire de l’énergie.

Ces actions sont obtenues sous l’action de récepteurs, différents selon l’action en cause. Au niveau cardiaque, les récepteurs sont de type bêta 1 ; au niveau vasculaire, ils sont de type bêta 2 (vasodilatateurs) ou alpha (vasoconstricteurs), c’est-à-dire un peu différents.

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Quels sont les effets des bêta-bloquants?

Ils bloquents l’action du système sympathique, et celle de l’adrénaline, c’est-à-dire les signes qui apparaissent à l’occasion d’un effort, ou d’un stress. Au repos, l’action des bêta-bloquants est donc beaucoup moins nette.

Au niveau du coeur, les bêta-bloquants vont diminuer la fréquence cardiaque, surtout au pic de l’effort ; habituellement, dans cette situation, on atteint une fréquence cardiaque de l’ordre de « 220 moins son âge », c’est-à-dire de 200/min lorsqu’on a 20 ans, et qui va diminuer avec le vieillissement. Avec un bêta-bloquant, cette fréquence cardiaque va être ralentie à environ 100 ou 110/min. C’est surtout au pic de l’effort qu’elle va diminuer. Les (-bloquants vont également diminuer la force de contraction du muscle cardiaque et la vitesse d’éjection du sang à partir de la cavité ventriculaire gauche, vers l’aorte. Ces effets devraient engendrer une diminution du débit cardiaque. Mais dans les faits, cette diminution est moins importante qu’on ne l’imagine, car si la fréquence baisse, le volume éjecté à chaque contraction va augmenter.

Au niveau vasculaire, on obtient un effet vasoconstricteur immédiat. En chronique, à l’inverse, l’effet des bêta-bloquants est plutôt vasodilatateur ; on les utilisepour traiter l’hypertension artérielle, car la pression baisse en raison de la dilatation des vaisseaux.

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Pas de bêta-bloquants pour les asthmatiques graves

L’effet sur les autres récepteurs pourrait être qualifié de néfaste, notamment au niveau pulmonaire : les récepteurs béta favorisent la dilatation des bronches, et leur blocage va favoriser la constriction des bronches. Chez les personnes sujettes aux crises d’asthme, les bêta-bloquants risquent par conséquent de déclencher des crises; ils sont donc contre indiqués dans les formes graves. Dans les formes modérées les choses sont plus compliquées et on essaye souvent pour juger de la tolérance.

Les bêta-bloquants sont largement prescrits

Ils le sont en effet dans de nombreuses maladies fréquentes : dans l’hypertension artérielle, il s’agit d’un des médicaments recommandés en première intention ; or elle touche 50% de la population des 55 à 65 ans. L’angine de poitrine, due au fait qu’une artère coronaire est rétrécie, est également une pathologie fréquente, pour laquelle on prescrit des bêta-bloquants. On peut également les utiliser pour traiter les arythmies, c’est-à-dire lorsque le coeur s’emballe.

Ainsi, nombreuses sont les personnes, dans la population, qui se voient prescrire des bêta-bloquants, pour des raisons tout à fait indépendantes du syndrome de Marfan.

Quels effets indésirables?

La meilleure façon de les connaitre ou de se rendre compte qu’il n’y a pas d’effet indésirable, est d’essayer le traitement bétabloquant.

Les personnes sous bêta-bloquants se plaignent parfois de fatigue, éventuellement, de malaises, mais qui sont assez peu fréquent ; en pratique, ce traitement s’avère bien toléré. Le plus souvent, les patients se plaignent seulement de fatigue passagère.

Certaines pathologies risquent de décompenser au cours du traitement, notamment l’insuffisance cardiaque (la diminution supplémentaire du débit cardiaque peut être mal tolérée).

Enfin, il faut signaler que l’impuissance représente un effet secondaire classique, même si sa fréquence est difficile à estimer, et souvent liée à un élément extérieur au traitement (comme par exemple, la pathologie qui a justifié la mise sous traitement).

Il faut savoir que le seul fait de prendre un médicament est souvent générateur d’effets secondaires ; dans toutes les études, même les « placebo » (c’est-à-dire ceux qui reçoivent un traitement dépourvu d’effets pharmacologiques), en génèrent. Par conséquent, le fait de ressentir quelque chose au début d’un traitement de bêta-bloquants ne doit pas faire conclure qu’il en est en cause.

Pourquoi choisir un bêta-bloquant plutôt qu’un autre?

Il existe beaucoup de bêta-bloquants sur le marché. On les différencie en fonction de certaines propriétés. Le Bisoprolol est le médicament recommandé le plus souvent actuellement dans le cadre du syndrome de Marfan, pour plusieurs raisons.

Une caractéristique des bêta-bloquants est leur liposolubilité, c’est-à-dire leur solubilité dans les graisses. Les médicaments liposolubles passent plus facilement dans le système nerveux central, et de ce fait, peuvent entraîner plus d’effets secondaires de type cauchemars, etc. Le bisoprolol, comme l’atenolol, a l’avantage de ne pas être liposoluble (il est hydrosoluble).

Dans le syndrome de Marfan, il s’agit de bloquer les récepteurs de type bêta-1 et non les autres ; or le bisoprolol (ou l’aténolol) est relativement spécifique de ce type de récepteur. Par ailleurs, mieux vaut prendre un médicament ayant une demi-vie longue, car cela permet de ne prendre qu’une prise par jour. La dose d’Atenolol prescrite est variable ; mais l’objectif est de faire baisser la fréquence cardiaque en dessous de 110 au pic de l’effort.

Pourquoi propose-t-on des bêta-bloquants aux personnes Marfan?

L’une des conséquences les plus graves du syndrome de Marfan est la dilatation trop importante de l’aorte au fil des ans ; il s’agit donc de faire en sorte de limiter cette dilatation aortique.

Précisons que chez chaque être humain, l’aorte se dilate avec l’âge. Car à chaque contraction cardiaque, l’aorte se distend un peu plus. Les facteurs favorisant sa dilatation sont les suivants : 1) la pression artérielle (c’est-à-dire la pression qui règne dans le vaisseau et tend à le distendre) ; 2) la fréquence cardiaque (c’est-à-dire le nombre de fois où l’aorte est distendue par minute) ; 3) la fragilité de la paroi aortique : plus la paroi est fragile et plus la dilatation va être rapide.

Une prévention efficace Une étude menée avec des individus Marfan (publiée dans le New England Journal of Medicine 1994, 330, 1335-1341), comprenant des sujets âgés de 12 ans et plus, a montré un effet nettement bénéfique des bêta-bloquants sur la progression de la dilatation aortique, au vu du suivi par échographie du diamètre aortique. Cette étude démontre clairement que la dilatation aortique est freinée au cours du temps grâce à un traitement de bêta-bloquants. On peut donc considérer qu’à partir de 12 ans, un tel traitement est bénéfique chez les personnes porteuses d’un syndrome de Marfan. Avant 12 ans, les indications sont moins formelles : faut-il donner des bêta-bloquants aux enfants en dessous de 12 ans ? La logique serait de proposer une protection le plus tôt possible, et donc de mettre en route le traitement béta-bloquant dès que cela est possible de façon simple. Notre habitude, à la consultation multidisciplinaire de l’hôpital Bichat, est de le proposer systématiquement si le diagnostic de Marfan est porté avec certitude, ce qui peut être difficile chez un enfant, et bien sûr en l’absence de contre-indication.

Intérêt du traitement béta-bloquant: figure ci dessous

• sur l’axe des Y:le rapport du diamètre aortique mesuré par rapport au diamètre normal (1: est le diamètre normal, 2: 2 fois le diamètre normal). L’aorte est mesurée au niveau des sinus de valsalva.

• sur l’axe des X: le temps en mois. Le suivi de 150 mois, soit plus de 10 ans, témoigne du sérieux de l’étude

• 70 patients ont été réparti en 2 groupes: 38 ne recevaient pas de traitement béta-bloquant (schéma du haut); 32 recevaient un traitement béta-bloquant (schéma du bas); 2 patients ne prenaient pas leur traitement et sont individualisés par des flèches. Il est clair que la vitesse de dilatation aortique est plus faible dans le groupe du bas que dans le groupe des patients qui recoivent un traitement béta-bloquant.


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Mise en garde importante

Il ne faut pas arrêter brutalement le traitement. Lorsque le traitement est pris, l’organisme réagit en augmentant la stimulation sympathique centrale (elle n’est pas efficace puisque les récepteurs sont bloqués). Si la transmission est rétablie par libération des récepteurs (arrêt du traitement), on peut observer un effet « rebond », avec augmentation de la fréquence cardiaque et de la force de contraction. Avec les bêta-bloquants utilisés actuellement, il faut un certain temps d’arrêt pour que le bêta-blocage soit effectivement levé, et si l’on oublie de prendre son comprimé le matin pour le prendre le soir, cela n’a pas beaucoup d’importance. En revanche, un oubli sur 3 à 4 jours consécutifs peut avoir plus de conséquences, et provoquera un effet opposé à celui recherché. Il faut donc prendre son traitement de facon régulière

Prévention de l’endocardite

il faut suivre les recommandations européennes , chez les porteurs de valve mécanique, ou de bio-prothèse ou de plastie aortique. Pas de prévention de l’endocardite chez les patients sans chirurgie valvulaire, à moins qu’une endocardite soit déjà survenue.

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